Extrait d’un article du journal Le Monde du 14 octobre 2010, relayé par le blog Environnement-Empreinte.

Depuis trois mois, les cyclistes peuvent emprunter les sens interdits dans l’ensemble des "zones 30", ces rues où la vitesse des véhicules est limitée à 30 km/h. Mais la mesure demeure encore mal acceptée par les automobilistes. Si les cyclistes comprennent facilement l’intérêt de rouler à contresens pour éviter les longs détours, une partie des usagers des véhicules à moteur (voiture et deux-roues) et des piétons se montrent perplexes et jugent ces nouveaux aménagements dangereux.

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Plusieurs municipalités rechignent à appliquer le texte. Lyon, qui se félicitait, voici quelques années, de posséder "la plus grande zone 30 d’Europe", a dans un premier temps limité le dispositif à quelques rues du centre-ville. "Nous souhaitons y aller progressivement et en toute sécurité", précise Gilles Vesco, conseiller municipal (divers gauche) chargé des déplacements....

Zone 30

Ces rues ne sont pas plus dangereuses que les autres, répond Alexandre Laignel, du Club des villes et territoires cyclables, qui rassemble un millier de collectivités, toutes tailles et couleurs politiques confondues. "On n’a constaté aucun accident dans les voies à double sens depuis trois mois", affirme-t-il. A Lyon, M. Vesco en convient : "On voit le danger en face, cela contribue à pacifier le trafic et notamment à faire descendre les cyclistes des trottoirs. Ainsi, le nombre d’accidents baisse", souligne-t-il. Le Club des villes et territoires cyclables, qui voit dans cet aménagement "un outil majeur" pour inciter les citadins à monter en selle, demande à l’Etat de "prendre sa part de pédagogie".

D’autres équipements urbains, répandus ailleurs, peinent à voir le jour en France. Dans le nord de l’Europe, les cyclistes circulent sur des "avenues vertes". Contrairement à ce que laisse supposer leur nom, il ne s’agit pas de pistes serpentant dans la nature, mais de grands axes urbains où les feux de signalisation sont synchronisés en fonction de la vitesse moyenne d’un cycliste et non de celle des automobilistes. A vélo, tous les feux sont verts, tandis qu’en voiture il faut stopper régulièrement.

"Culture d’ingénieur"

Aucune ville française n’envisage de modifier aussi radicalement les règles de circulation. "La culture d’ingénieur qui prévaut en France, très marquée par la voiture, peine à envisager le vélo comme un mode rapide et efficace", déplore Véronique Michaud, secrétaire générale du Club des villes et territoires cyclables. Dans l’Hexagone, seuls 2 % à 3 % de citadins pédalent quotidiennement. La proportion atteint 15 % à Berlin et 37 % à Amsterdam.

A Copenhague, où les embouteillages de vélos ne sont pas rares, la municipalité s’emploie avant tout à renforcer "la sécurité et le sentiment de sécurité", affirme Bo Armus Kjelgaard, maire adjoint chargé de l’environnement, qui accueillait, en juin, la conférence Velo-city. Dans la capitale danoise, personne ne peut ignorer les voies cyclables, peintes en bleu ciel lorsqu’elles traversent un carrefour et suffisamment larges pour permettre à deux cyclistes de converser tranquillement tandis qu’un troisième, plus pressé, les double.

La ville de New York a suivi l’exemple nordique. "C’est la copenhaguisation", sourit Janet Sadik Khan, conseillère du maire pour la mobilité , Michael Bloomberg. Plusieurs carrefours emblématiques du coeur de Manhattan, tels que Times Square ou Columbus Circle, ont été aménagés. Les New-Yorkais se sont habitués aux pistes vert pomme qui jalonnent Broadway.

Aux États-Unis, certains employeurs incitent en outre leurs salariés à utiliser leur vélo. "Compte tenu du fonctionnement du système de santé américain, c’est une forme d’investissement", commente Jeff Mapes, auteur d’un récent ouvrage au titre choc, Pedaling Revolution. Et de préciser : "Les entreprises qui financent une partie de la protection sociale ont intérêt à ce que les employés se maintiennent en bonne santé."