Une étude bienvenue…
En 2011, à l’occasion du congrès du Club des Villes et Territoires Cyclables, L’Heureux Cyclage prononçait déjà ces mots qui seront repris ensuite dans un article en 2013 : « Développement de l’usage du vélo : Le vélo ESS, plutôt que le VLS ! »
Il faut comprendre dans cette formulation : les ateliers vélo participatifs et solidaires plutôt que le Vélo en Libre Service. Ce sont alors deux nouveaux services vélos en plein essor dans le paysage français.
Aujourd’hui, l’ADEME publie une étude présentant l’offre et les impacts des services vélos que peuvent déployer les collectivités [1]. Coûts de fonctionnement, nombre de kilomètres générés à vélo, report modal depuis les autres modes de déplacements, CO2 évité, activité physique et potentiel économique sont autant de critères d’évaluation pour comparer les services entre eux.
Cette étude sous-entend qu’aujourd’hui, il est désormais communément admis que si les infrastructures sont importantes dans les politiques vélos des collectivités, c’est d’avantage l’apaisement des vitesses et les services vélos qui font la différence entre des villes aux infrastructures équivalentes.
L’évaluation des services vélos montre un fort attrait de ce bouquet de services par les catégories socio-professionnelles les plus aisées, notamment ceux ayant trait à l’électro-mobilité (location de VAE, aides à l’achat). Seules la location de vélos classiques et surtout les vélo-écoles touchent réellement une frange moins aisée de la population.
… mais présentant quelques manques au sujet des VLS…
Bien que leurs offres soient documentées dans la présente étude, ces deux services vélos manquent cruellement à l’appel quand il s’agit d’évaluer leurs impacts respectifs.
En ce qui concerne le VLS, qui est sans doute le plus médiatique de tous les services vélo, certes, le développement de ces systèmes a permis de remettre en selle certains usagers et, par effet d’entraînement et de médiatisation, redorer l’image du vélo auprès d’élus locaux réfractaires [2].
Mais d’une part ils sont uniquement développés dans les centres-villes, oubliant une large part de la population ; d’autre part ils affichent des coûts exorbitants : entre 2 500 € et 4 000 € par an et par vélo, soit selon le degré d’utilisation un coût de 0,5 à 2 € par déplacement, non pas pour l’usager qui ne paye que son abonnement annuel, mais pour les collectivités [3]. Dans une ville aux finances limitées comme Marseille par exemple, cela fait peut-être un peu cher le tour de toboggan à 1,5€ pour descendre au vieux port, surtout si le report modal se fait au détriment de la marche ou des transports publics plutôt que de la voiture.
Mieux vaut-il en France 45 000 VLS à 3 000-3 500€ par an et par vélo ou bien 27 000 vélos en location longue durée comme actuellement ? Le VLS évite-t-il plus de pollution et de gaz à effet de serre qu’un autre service vélo ? Et s’il était électrique économiserait-on davantage de kilomètres motorisés ? L’étude ne permet pas de le dire mais contient une première analyse disponible qui permet déjà de douter de l’efficacité d’un tel type de service dans les agglomérations moyennes en France au regard de l’usage : pour une dizaine de services en place, il y a moins d’une rotation par jour par vélo.
… et des ateliers participatifs et solidaires.
Qu’en est-il du vélo ESS ou plutôt des ateliers vélo solidaires et participatifs? Là non, plus l’étude ne permet pas de se prononcer puisqu’elle n’entre pas dans le détail des impacts de ces structures.
Pourtant le panorama annuel de L’Heureux Cyclage [4] donne quelques éléments de réponse, et leur nombre sans cesse croissant montre que la demande est bien présente.
Cette activité qui a pour vocation de permettre aux cyclistes de réparer eux-mêmes leur bicyclette et de remettre en état des vélos délaissés répond à un besoin grandissant, tant vis-à-vis des usagers, que des collectivités. En mettant en place un modèle d’économie circulaire locale et sobre en énergie, les ateliers vélo sont de surcroît générateurs de richesses.
Créateur d’emplois, ils ont un potentiel économique formidable tout en développant une filière de compétence remarquable dans le paysage français.
Ces ateliers maintiennent sans doute mieux que n’importe quel autre service vélo la pratique quotidienne des cyclistes. Par leurs effets de réseau et leurs lieux communautaires ce sont de véritables fabriques à nouveaux cyclistes. Le spectre de leurs adhérent·e·s est sans équivalent car ils arrivent à toucher toutes les populations y compris les moins aisées grâce à une accessibilité financière chère à tous les ateliers du réseau.
De plus, ils offrent une base remarquable pour le développement de point multiservices dans les villes. Enfin, étant donné le niveau d’autofinancement élevé de ces structures d’innovation sociale, l’investissement des collectivités locales dans cette activité s’avère particulièrement efficace.
Pourquoi ne pas aller au bout de l’exercice ?
L’étude sur les services vélo conclut que le succès du VLS est relayé maintenant par les services vélos pour toucher durablement une population plus diversifiée. Mais quel est l’impact réel du VLS au regard de son coût économique ? En utilisant les mêmes critères peut-on comparer ce services aux autres et notamment aux ateliers vélo participatifs et libres ?
Nous posons aujourd’hui la question à l’ADEME et nous leur soumettons l’idée de réaliser une étude complémentaire sur ces deux services vélo qui ne peuvent pas être écartés des évaluations tant ils sont présents sur le territoire national.
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