Le GIPREB, un syndicat mixte centré sur l’étang de Berre a publié récemment un numéro de sa revue consacré entièrement à un long reportage sur un tour de l’étang à vélo. C’est un bon moment pour nous pour écrire un article sur le sujet.

Le numéro de novembre 2022 de la revue du GIPREB

Cette revue intitulée « Visions d’étang » a une parution faible (1 numéro par an environ). Logiquement, elle parle habituellement de l’étang de Berre comme « masse d’eau », le GIPREB étant avant tout chargé du suivi écologique. Le numéro précédent (le n°10, de novembre 2021) était ainsi consacré à la pêche.

Le numéro qui nous intéresse et le dernier en date, celui titré « l’étang de Berre à vélo » est donc un « numéro spécial » d’une revue pas du tout centrée sur le vélo. Ce numéro a d’ailleurs été écrit par une seule personne, Thibault Vergoz, un journaliste qui ne fait pas partie du GIPREB et qui semble avoir proposé le sujet. Il s’agit d’un reportage fait sur trois jours l’été 2022, en mode cyclotouriste, avec plein d’interviews de gens rencontrés, le plus souvent par hasard, au cours du périple.

Même si on attend évidemment autre chose d’un syndicat mixte en charge d’un étang qui n’a actuellement qu’une biodiversité qui n’est que l’ombre de celle qu’il avait au début des années 1960, l’initiative est sympathique et la réalisation l’est autant. Le journaliste a fait un travail honnête, avec un beau texte, de belles photos et les personnes rencontrées par hasard (ou pas) sont finalement assez représentatives.

Cette honnêteté va jusqu’à glisser deux passages sur les conditions difficiles dans lesquelles il a dû pédaler sur les routes qui contournent l’étang au plus près. Nous reproduisons ci-dessous ces deux passages.

Le premier extrait est tiré de la page 11, c’est le premier jour et le journaliste était parti de Berre-L’Etang le matin.

Je contourne alors le fond de l’anse de Saint-Chamas pour emprunter la fameuse « route du Delà » qui mène à Istres en longeant l’étang de Berre au plus près de ses rives. La route est étroite et les conducteurs me dépassent avec plus ou moins de courtoisie. La beauté de la vue sur Saint-Chamas en face rattrape un peu les choses. Depuis mon départ ce matin, je m’étonne qu’en plein mois de juillet je n’ai pas encore croisé le moindre cyclotouriste… Il faut dire que les aménagements pour les vélos ont pour l’instant brillé par leur inexistence, hormis le long du port de Saint-Chamas récemment réaménagé pour la promenade. C’est vraiment dommage car l’itinéraire mérite le détour.

Le second extrait est tiré de la page 22, on est le matin du troisième jour, alors que le journaliste a passé la nuit au camping du Jaï.

Après avoir enchaîné deux double-espresso pour reprendre mes esprits, je me sens en mesure d’enfourcher mon vélo à nouveau. Le mistral est tombé dans la nuit. L’étang de Berre est calme et quelques promeneurs profitent de la plage avant la chaleur de la journée. Je pars en direction de Vitrolles. Mais un obstacle de taille se dresse entre moi et l’objectif : l’aéroport de Marignane. Le contourner est obligatoire, via un détour d’une dizaine de kilomètres. Rallier Saint-Victoret, dans l’axe des pistes, est une promenade de santé grâce à de bienvenues pistes cyclables. Toutes les trois minutes un avion passe en rase-motte pour se poser. Mais rejoindre Vitrolles depuis ce point précis est une autre paire de manches. Clairement, le vélo n’est plus le bienvenu ici. Perdu au milieu des échangeurs, je me résous à emprunter la quatre-voies en direction de Marseille., malgré la présence d’un magnifique « interdit aux vélos » cerclé de rouge, flambant neuf, à l’entrée de celle-ci. Pédalant tant bien que mal parmi le flux des poids lourds et des automobilistes énervés, terriblement pressés de se rendre je ne sais où, je tente de survivre en équilibre entre les tonnes de métal qui me frôlent d’un côté et le tapis de verre brisé qui jonche le bas côté à quelques centimètres de mes roues. Sain et sauf, je m’extrais de cet enfer par la zone industrielle des Estroublancs ma porte d’entrée de Vitrolles.

Nos propres expériences du tour de l’étang

La dangerosité de la route du Delà est connue depuis longtemps des cyclistes locaux. Firmin, un de nos adhérents des premières années, mais en l’occurrence surtout membre de Martigues-Cyclotourisme, est mort sur cette route fauché par une voiture en novembre 2017. Depuis cette date, Martigues-Cylotourisme n’emprunte plus cette route pour les randonnées qu’ils organisent. Cette route est chaque année fermée tout un week-end de mai pour une course de côte (de voiture, on ne calculera pas le bilan CO2 de l’affaire), les cyclotouristes suggèrent depuis longtemps que qu’elle soit aussi un jour réservée aux cyclistes et piétons. Une idée qui n’a jusqu’ici jamais fait son chemin…

Les cyclotouristes de passage qui utilisent Google Map (ou autre application d’itinéraire) ont des surprises avec les itinéraires proposés autour de l’étang de Berre pour un trajet vélo. On pourra citer cette interview de cyclotouriste de passage datant de 2020 auquel Google Map proposait de faire à la fois la route du Delà et le contournement de l’aéroport pour rejoindre Marseille ! ! Mais la situation n’a guère évolué : il n’y a pas d’itinéraire vélo et les applications proposent juste les routes autorisées au vélo les plus directes, sans indiquer de niveau de confort ou de dangerosité…

L’association L’Étang Nouveau, qui milite pour l’amélioration écologique de l’étang, a organisé une fois par an sur plusieurs années une randonnée autour de l’étang (voir par ex cette édition de 2014) qui empruntait peu ou prou les routes empruntées par T Vergoz pour son reportage. Les organisateurs (et les participants) serraient un peu les fesses aux alentours de l’aéroport, en demandant aux participants de rester bien groupés. C’est un souvenir personnel…

Enfin une des premières propositions de RAMDAM, notre fédération métropolitaine des associations de promotion du vélo comme moyen de déplacement, portait sur les itinéraires qui nous paraissaient les plus faciles à aménager pour le vélo, qui permettaient de « faire le tour de la métropole AMP » mais plus concrètement de faire le tour de l’étang de Berre. Il n’était pas uniquement question de tourisme et donc de longer l’étang au plus près et la boucle proposée était plus large et essayait d’utiliser certaines portions d’itinéraires du plan national vélo comme la V65 » Azur-Camargue ». Cette idée était sortie juste à temps pour être reprise dans le Plan Vélo Métropolitain 2019-2024 sous la forme de 8 lignes formant le tour de la métropole (et donc de l’étang de Berre). L’image ci-dessous est tirée du Plan et concerne les 8 lignes « tour de l’étang de Berre ».

A noter que le Plan Vélo Métropolitain parle aussi de 8 autres « lignes sécurisées vélo » sur Marseille même. Ces deux séries de lignes sont chaque fois notées de 1 à 8, ce qui fait qu’on ne sait jamais desquelles 8 lignes on parle… Attention si vous faites des recherches sur le net sur le sujet…

Depuis on attend. parfois on tombe sur la confirmation d’une étude de faisabilité, comme celle-ci qui indique que ladite étude portant sur les lignes 1 et 2 (celles qui intéresse notre association) doit être faite en 11 mois, mais sans précision de dates. On y croit sans trop y croire. On contactera les bureaux d’études maître d’œuvre : l’une est la société Présents (ex-Sitétudes), l’autre est Horizon-Conseil) pour proposer notre expertise au cas où l’étude serait en cours. On ne sait jamais…

Conclusion

Le tour de l’étang de Berre à vélo est possible, comme l’a prouvé Thibault Vergoz, le journaliste qui a proposé ce reportage au GIPREB. Certaines parties sont néanmoins souvent désagréables car étroites et fréquentées par des voitures roulant vite (route du Delà, bord de l’étang entre Berre-L’Etang et Saint-Chamas…) et donc à éviter en semaine aux heures où les gens vont au travail ou en reviennent. Le contournement de l’aéroport est TRÈS et toujours désagréable avec un trafic automobile qui ne se limite pas aux heures de pointe.

On attend avec impatience les 8 lignes sécurisées vélo du Plan Vélo Métropolitain qui doivent faire le tour de la Métropole et donc le tour de l’étang avant 2030… même si on n’est pas sûr de voir une seule fois l’étang depuis ces pistes.